sabato 24 gennaio 2009

Extension du domaine de la lutte

Je n'aime pas ce monde. Décidément, je ne l'aime pas. La société dans laquelle je vis me dégoûte; la publicité m'écœure; l'informatique me fait vomir. Tout mon travail de informaticien consiste à multiplier le références, les recoupements, les critères de décision rationnelle. Ça n'a aucun sens. Pour parler franchement, c'est même plutôt négatif; un encombrement inutile pour les neurones. Ce monde a besoin de tout, sauf d'informations supplémentaires.

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Le désir d'amour est profond chez l'homme, il plonge ses racines jusqu'à des profondeurs étonnantes, et la multiplicité de ses radicelles s'intercale dans la matière même du cœur. Malgré l'avalanche d'humiliations qui constituait l'ordinaire de sa vie, Brigitte Bardot espérait et attendait. À l'heure qu'il est elle continue probablement à espérer et à attendre. Une vipère se serait déjà suicidée, à sa place. Les hommes ne doutent de rien.

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[...] dans le second exemple j'ai subrepticement introduit le concept d'amour, alors que mon argumentation se fondait jusqu'à présent sur la sexualité pure. Contradiction? Incohérence? Ha ha ha!

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Je l'ai aimée, autant qu'il était en mon pouvoir - ce qui représente beaucoup d'amour. Cet amour fut gaspillé en pure perte, je le sais maintenant; j'aurais mieux fait de lui casser le deux bras.

Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte

lunedì 12 gennaio 2009

El inmortal

Las noches del desierto pueden ser frías, pero aquélla había sido un fuego. Soñé que un río de Tesalia (a cuyas aguas yo había restituido un pez de oro) venía a rescatarme; sobre la roja arena y la negra piedra yo lo oía acercarse; la frescura del aire y el rumor atareado de la lluvia me despertaron. Corrí desnudo a recibirla. Declinaba la noche; bajo las nubes amarillas la tribu, no menos dichosa que yo, se ofrecía a los vívidos aguaceros en una especie de éxtasis. Parecían coribantes a quienes posee la divinidad. Argos, puestos los ojos en la esfera, gemía; raudales le rodaban por la cara; no sólo de agua , sino (después lo supe) de lágrimas. Argos, le grité, Argos.
Entonces, con mansa admiración, como si descubriera una cosa perdida y olvidada hace mucho tiempo, Argos balbuceó estas palabras: Argos, perro de Ulises.Y después, también sin mirarme: Este perro tirado en el estiércol.
Fácilmente aceptamos la realidad, acaso porque intuimos que nada es real. Le pregunté qué sabía de la Odisea. La práctica del griego le era penosa; tuve que repetir la pregunta.
Muy poco, dijo. Menos que el rapsoda más pobre. Ya habrán pasado mil cien años desde que la inventé.

Jorge Luis Borges, El inmortal